Adresse
30 rue de la Masse
84000 AVIGNON
Tél. : 04 90 33 75 83
A l’heure actuelle, chacun s’efforce de goûter la plénitude de la vie en s’éloignant de ses semblables et en recherchant son bonheur individuel. Mais ces efforts, loin d’aboutir à une plénitude de vie, ne mènent qu’à l’anéantissement total de l’âme, à une sorte de suicide moral par un isolement étouffant. A notre époque, la société s’est décomposée en individus, qui vivent chacun dans leur tanière comme des bêtes, se fuient les uns les autres et ne songent qu’à se cacher mutuellement leurs richesses. Ils en viennent ainsi à se détester et à se rendre détestables eux-mêmes. L’homme amasse des biens dans la solitude et se réjouit de la puissance des biens qu’il croit acquérir, se disant que ses jours sont désormais assurés. Il ne voit pas, l’insensé, que plus il en amasse et plus il s’enlise dans une impuissance mortelle. Il s’habitue en effet à ne compter que sur lui-même, ne croit plus à l’entraide, oublie, dans sa solitude, les vraies lois de l’humanité, et en vient finalement à trembler chaque jour pour son argent, dont la perte le priverait de tout. Les hommes ont tout à fait perdu de vue, de nos jours, que la vraie sécurité de la vie ne s’obtient pas dans la solitude, mais dans l’union des efforts et dans la coordination des actions individuelles.» (Fiodor Dostoïevski)
"Le choix de la direction ou du chemin ne doit pas être décidé par une norme, pas même par la sagesse. On attend du thérapeute ou de l'analyste qu'il pousse le patient dans la direction de son désir. En fait, c'est pourquoi la thérapie prend du temps, car, avant, poussant, le désir doit pouvoir se manifester un peu."
" Lettres au jeune thérapeute - Contardo Calligaris, 2004.
Le Docteur Dominique BARBIER, Psychanalyste à Avignon, a récemment effectué une interview en format ITW pour le journal Le Vif intitulé "l'adulte est devenu une espèce en voie de disparition".
Retrouvez l'ensemble de cette interview dès à présent.
Ferenczi a raison de dire qu’en adressant au sujet l’ordre de dormir, qui sert d’introduction à l’hypnose, l’hypnotiseur prend, aux yeux de celui-là, la place des parents. Il croit pouvoir distinguer deux variétés d’hypnose : celle qui résulte d’une suggestion apaisante, comme accompagnée de caresses, et celle qui est produite par un ordre menaçant. La première serait l’hypnose maternelle, la dernière l’hypnose paternelle.
D’autre part, l’ordre de dormir, destiné à provoquer l’hypnose, n’est en somme que l’ordre de détacher son intérêt du monde extérieur, pour le concentrer tout entier sur la personne de l’hypnotiseur : c’est d’ailleurs ainsi que le comprend le sujet lui-même, puisque dans ce détachement de l’intérêt des objets et faits du monde extérieur réside la caractéristique psychologique du sommeil, et c’est sur lui que repose l’affinité entre le sommeil véritable et l’état hypnotique.
C’est ainsi que, par ses procédés, l’hypnotiseur éveille chez le sujet une partie de son héritage archaïque qui s’est déjà manifesté dans l’attitude à l’égard des parents, et surtout dans l’idée qu’on se faisait du père : celle d’une personnalité toute-puissante et dangereuse, a l’égard de laquelle on ne pouvait se comporter que d’une manière passive et masochiste, devant laquelle on devait renoncer complètement à sa volonté propre et dont on ne pouvait aborder le regard sans faire preuve d’une coupable audace.
C’est ainsi seulement que nous pouvons nous représenter l’attitude de l’individu de la horde primitive à l’égard du père de la horde. Ainsi que nous le savons par d’autres réactions, l’aptitude à revivre ces situations archaïques varie de degré d’un individu à l’autre. Le sujet est cependant capable de conserver une connaissance vague qu’au fond l’hypnose n’est qu’un jeu, qu’une reviviscence illusoire de ces impressions anciennes, ce qui suffit à l’armer d’une résistance suffisante contre les conséquences trop graves de la suppression hypnotique de la volonté.
ou quand une histoire se répète…
"Ce qui se répète ce sont les chagrins d'amour, le sentiment d'impuissance, les insomnies, les colères. Un jour, on se rend compte que sous l'apparente diversité de nos expériences et la distribution (malheureuse, croit-on) du hasard, il y a peut-être une logique du désir qui conduit sa vie à se fracasser au même endroit, sur un même affect. Et l'on commence alors à chercher quel est ce malin génie qui "veut" à notre insu la répétition des crises. Par exemple, l'un croit sa femme hystérique, la quitte, rencontre une douce jeune fille et les crises d'hystérie recommencent. Contre toute attente la jeune fille s'est révélée une furie. Mais lui, que vient-il chercher dans ce recommencement sans cesse reconduit de ces crises ?
A la surface de la plainte, rien ne bouge. Mais si l'on cherche dans les rêves, les actes manqués, la parole hésitante de qui se risque au bord de soi, si l'on écoute avec une patience et une précision de détective pourquoi il "faut que ça se répète", on arrive parfois à s'approcher de cette terreur que protège la répétition. Les crises d'angoisse, la peur d'être abandonnée, les symptômes, sont là pour empêcher le sujet de percevoir les loyautés infantiles qui le protègent. Plus insistantes que le moi lui-même, elles maintiennent fermé le champ de l'avenir."
(Anne Dufourmantelle, En cas d'amour. Psychopathologie de la vie amoureuse, Payot-rivages, 2012, p.28-29)
L’inconscient, ce terme n’est pas de Freud.
Il apparaît, d’emblée, dans un sens privatif, en philosophie, et en psychologie dans la deuxième moitié du XIXè siècle. Nietzsche parle des "oubliettes de l'âme" !
Il s'agit de ce qui n’est pas conscient, un-bewusste, in-conscient.
C’est aussi un terme du langage courant, comme adjectif, « ce qui n’est pas conscient », comme substantif « irresponsable », un peu « fou », incapable de se rendre compte de ses faits et gestes.
Comme concept, en 1751 un juriste écossais, Henry Home Kannes, y fait référence pour signifier la « non-conscience ».
Puis il est vulgarisé en Allemagne, à l’époque romantique, comme réservoir d’images mentales, source de passions dont le contenu échappe à la conscience.
Introduit en langue française vers 1860, avec la signification de vie inconsciente par l’écrivain suisse Henri Amiel (1821-1881).
Admis dans le Dictionnaire de l’Académie Française en 1878.
En psychanalyse, cela devient autre chose : un lieu, Freud en parle comme d’une autre scène, eine andere Platz, ou aussi eine andere Schauplatz. Une place, un lieu où quelque chose se montre, se fait voir, entendre, se révèle. C’est d’abord une hypothèse (confirmée aujourd’hui), un lieu inconnu de la conscience (spontanée et réfléchie). C’est un lieu psychique spécifiquement référé à une sorte de conscience inconsciente.
Freud n’invente pas le concept, il lui donne un sens nouveau, qu’il va légitimer avec ses investigations personnelles.
2 grandes forces composent la personnalité :
- la génétique
- l’empreinte familiale et parentale inconscientes.
Un travail sur soi permet de connaître les influences inconscientes et de les modifier pour mettre de l’huile dans les rouages.
Une façon d'interroger le symptôme dans son rapport au fantasme et aussi de saisir les processus d'identification inconsciente à des modèles que nous nous sommes choisis.
C’est peu, mais c’est énorme !
Cela suppose une grande souplesse et une grande intelligence…
Le surmoi ne prononce pas d'injonctions, il ne dit pas: "Tu dois", mais : "Tu aurais dû" ou : "Tu n'aurais pas dû" (il vous tutoie toujours celui-là, ce détestable ennemi intime qui prétend être votre ami, vouloir votre bien). Il vient constater la faute après qu'elle a été commise. L'effort de l'obsessionnel pour faire que la faute, fût-ce la plus infime, n'ait pas été commise, pour que ça ne soit pas arrivé (l'annulation rétroactive), vise à contrecarrer la voix du surmoi. Elle ne parvient qu'à la renforcer, à en accentuer la férocité, une férocité parfois doucereuse.
(J.-B. Pontalis, En marge des jours)
Une psychanalyse est une enquête risquée, sans assurance d'arriver jamais au terme de la recherche.
Pas de certitude d'être dans la vérité d'une origine ni de résolution définitive à l'angoisse.
Et pourtant il est question de "se trouver".
Une trouvaille pareille à nulle autre. Parce qu'il faut du courage pour l'entreprendre, et parce qu'il y a de la douceur aussi dans le cheminement de cette rencontre avec soi. Sur le terrain balisé de la répétition que la névrose défend, l'inespéré traduit la possibilité d'une alternative. "Tu peux changer ta vie", dit le vers d'un poème de Rilke. Et s'il s'agissait d'abord de se perdre, c'est-à-dire de mettre à l'épreuve une certaine idée que l'on se faisait de soi?
(Anne Dufourmantelle, Laura Leter
Se trouver, dialogue sur les nouvelles souffrances contemporaines)
L’incertitude est ce dont la névrose a le plus horreur.
Toute notre organisation névrotique (et nous sommes tous névrosés) consiste à faire barrage à l’inattendu. L’inconscient est un GPS qui intègre toutes les données de votre généalogie, de votre enfance et de ce que vous avez vécu. Il vous indique des chemins et des routes qu’il trouve plus sûrs ou moins encombrés.
Si vous lui donnez un itinéraire ou un lieu inconnu, il va tout faire pour que vous n’y alliez pas parce qu’il y a trop de risques. Par contre, ce qui est sympathique avec l’inconscient c’est que, de la même manière qu’un GPS, il va intégrer la nouvelle route la deuxième fois, il va y aller. L’inconscient fonctionne dans la répétition.
Cette capacité à l’inattendu c’est quelque chose qu’il faut trouver dans l’aptitude à être au présent.
Et le lâcher prise est fondamental. Le problème, c’est que cela ne se décide pas. Ce n’est pas une question de volonté.
Le lâcher prise n’empêche pas la vigilance. Au contraire, il l’appelle.
Le risque met sur le qui-vive, puisqu’il y a du danger. Cela met en éveil.
Il faudrait lutter contre les deux piliers de la névrose qui, pour éviter l’inattendu, se repose à 90% sur deux grosses ficelles – à savoir « la vie commence demain » ou dans deux heures ou dans une heure.
C’est-à-dire qu’elle vous dit : « Oui, bien sûr, on va changer ci et ça ». Elle est très accommodante, la névrose. Elle veut bien changer, mais pas tout de suite.
L’autre ficelle, c’est le tout ou rien. « C’est noir ou blanc ». D’où l’idée qu’il n’y a pas de petit choix, comme s’il n’y avait pas de gris entre les deux. Or, dès que vous commencez du gris, vous amorcez quelque chose.
(Anne Dufourmantelle, Eloge du risque)