Le symptôme Avignon

20 déc 2023

" J’appelle symptôme tout ce qui vient du réel. Et le réel c’est tout ce qui ne va pas, ce qui ne fonctionne pas, ce qui fait obstacle à la vie de l’homme et à l’affirmation de sa personnalité. Le réel revient toujours à la même place, on le trouve toujours là, avec les mêmes manifestations. Les scientifiques ont une belle formule : qu’il n’y a rien d’impossible dans le réel. Il faut un sacré culot pour des affirmations de ce genre, ou bien comme je le soupçonne, l’ignorance totale de ce qu’on fait et de ce qu’on dit.

Le réel et l’impossible sont antithétiques ; ils ne peuvent aller ensemble. L’analyse pousse le sujet vers l’impossible, elle lui suggère de considérer le monde comme il est vraiment, c’est-à-dire imaginaire et sans aucun sens. Alors que le réel, comme un oiseau vorace, ne fait que se nourrir de choses sensées, d’actions qui ont un sens.

On entend toujours répéter qu’il faut donner un sens à ceci et à cela, à ses propres pensées, à ses propres aspirations, aux désirs, au sexe, à la vie. Mais de la vie nous ne savons rien de rien, comme s’essoufflent à l’expliquer les scientifiques."

 

(Jacques Lacan, Entretien avec Emilia Granzotto pour le journal Panorama - Rome 74 )

La psychanalyse, Isabelle Huppert Avignon

10 déc 2023

Isabelle Huppert : "J’ai commencé une analyse quand j’avais vingt ans, à peu près au moment où j’ai commencé à jouer. J’ai senti très tôt qu’il y avait certaines images, certains clichés qui sont attachés à la fonction d’actrice ; que ce n’était pas par là que j’allais expérimenter le fait d’en être une. Je pensais, d’abord, qu’être actrice, c’était exprimer quelque chose de l’ordre de la souffrance. Ce que j’appelais la souffrance était peut-être simplement le regard, le mien. Voir la vérité. C’était peut-être ça que j’appelais la souffrance. (...)
Je crois que dès le début, il y a eu pour moi ce travail sur la vérité. Les acteurs disent communément qu’ils adorent s’abandonner dans les personnages, mentir, se déguiser ou penser qu’ils ont d’autres vies. C’est un discours qui m’a toujours été totalement étranger. Je n’ai jamais pensé qu’être actrice, c’était aller habiter d’autres vies. Pour moi, c’était au contraire une inlassable exploration de moi-même, un mouvement en profondeur et non pas un élan vers l’extérieur ; une verticalité. " 

(Cahier du cinéma, n° 477, mars 1994,  https://www.antoinette-fouque.com/fiches/dialogue-isabelle-huppert)

F. DOSTOÏEVSKI et l'humanisme

2 sep 2023

A l’heure actuelle, chacun s’efforce de goûter la plénitude de la vie en s’éloignant de ses semblables et en recherchant son bonheur individuel. Mais ces efforts, loin d’aboutir à une plénitude de vie, ne mènent qu’à l’anéantissement total de l’âme, à une sorte de suicide moral par un isolement étouffant. A notre époque, la société s’est décomposée en individus, qui vivent chacun dans leur tanière comme des bêtes, se fuient les uns les autres et ne songent qu’à se cacher mutuellement leurs richesses. Ils en viennent ainsi à se détester et à se rendre détestables eux-mêmes. L’homme amasse des biens dans la solitude et se réjouit de la puissance des biens qu’il croit acquérir, se disant que ses jours sont désormais assurés. Il ne voit pas, l’insensé, que plus il en amasse et plus il s’enlise dans une impuissance mortelle. Il s’habitue en effet à ne compter que sur lui-même, ne croit plus à l’entraide, oublie, dans sa solitude, les vraies lois de l’humanité, et en vient finalement à trembler chaque jour pour son argent, dont la perte le priverait de tout. Les hommes ont tout à fait perdu de vue, de nos jours, que la vraie sécurité de la vie ne s’obtient pas dans la solitude, mais dans l’union des efforts et dans la coordination des actions individuelles.» (Fiodor Dostoïevski)

Le temps dans la cure

25 aoû 2023

"Le choix de la direction ou du chemin ne doit pas être décidé par une norme, pas même par la sagesse. On attend du thérapeute ou de l'analyste qu'il pousse le patient dans la direction de son désir. En fait, c'est pourquoi la thérapie prend du temps, car, avant, poussant, le désir doit pouvoir se manifester un peu."

" Lettres au jeune thérapeute - Contardo Calligaris, 2004.

ITW du docteur Dominique BARBIER pour le journal Le Vif

ITW du docteur Dominique BARBIER pour le journal Le Vif

27 juin 2023

Le Docteur Dominique BARBIER, Psychanalyste à Avignon, a récemment effectué une interview en format ITW pour le journal Le Vif intitulé "l'adulte est devenu une espèce en voie de disparition".

Retrouvez l'ensemble de cette interview dès à présent.

En savoir plus

Pour toute demande de renseignement, n'hésitez pas à contacter Dominique BARBIER, psychanalyte à Avignon.

Hypnose maternelle et hypnose paternelle selon Freud Avignon

29 mai 2023

Ferenczi a raison de dire qu’en adressant au sujet l’ordre de dormir, qui sert d’introduction à l’hypnose, l’hypnotiseur prend, aux yeux de celui-là, la place des parents. Il croit pouvoir distinguer deux variétés d’hypnose : celle qui résulte d’une suggestion apaisante, comme accompagnée de caresses, et celle qui est produite par un ordre menaçant. La première serait l’hypnose maternelle, la dernière l’hypnose paternelle.

 

D’autre part, l’ordre de dormir, destiné à provoquer l’hypnose, n’est en somme que l’ordre de détacher son intérêt du monde extérieur, pour le concentrer tout entier sur la personne de l’hypnotiseur : c’est d’ailleurs ainsi que le comprend le sujet lui-même, puisque dans ce détachement de l’intérêt des objets et faits du monde extérieur réside la caractéristique psychologique du sommeil, et c’est sur lui que repose l’affinité entre le sommeil véritable et l’état hypnotique.

 

C’est ainsi que, par ses procédés, l’hypnotiseur éveille chez le sujet une partie de son héritage archaïque qui s’est déjà manifesté dans l’attitude à l’égard des parents, et surtout dans l’idée qu’on se faisait du père : celle d’une personnalité toute-puissante et dangereuse, a l’égard de laquelle on ne pouvait se comporter que d’une manière passive et masochiste, devant laquelle on devait renoncer complètement à sa volonté propre et dont on ne pouvait aborder le regard sans faire preuve d’une coupable audace.

 

C’est ainsi seulement que nous pouvons nous représenter l’attitude de l’individu de la horde primitive à l’égard du père de la horde. Ainsi que nous le savons par d’autres réactions, l’aptitude à revivre ces situations archaïques varie de degré d’un individu à l’autre. Le sujet est cependant capable de conserver une connaissance vague qu’au fond l’hypnose n’est qu’un jeu, qu’une reviviscence illusoire de ces impressions anciennes, ce qui suffit à l’armer d’une résistance suffisante contre les conséquences trop graves de la suppression hypnotique de la volonté.

Répétition, pulsion de mort et principe de loyauté inconsciente Avignon

10 mai 2023

ou quand une histoire se répète… 

 

"Ce qui se répète ce sont les chagrins d'amour, le sentiment d'impuissance, les insomnies, les colères. Un jour, on se rend compte que sous l'apparente diversité de nos expériences et la distribution (malheureuse, croit-on) du hasard, il y a peut-être une logique du désir qui conduit sa vie à se fracasser au même endroit, sur un même affect. Et l'on commence alors à chercher quel est ce malin génie qui "veut" à notre insu la répétition des crises. Par exemple, l'un croit sa femme hystérique, la quitte, rencontre une douce jeune fille et les crises d'hystérie recommencent. Contre toute attente la jeune fille s'est révélée une furie. Mais lui, que vient-il chercher dans ce recommencement sans cesse reconduit de ces crises ?

A la surface de la plainte, rien ne bouge. Mais si l'on cherche dans les rêves, les actes manqués, la parole hésitante de qui se risque au bord de soi, si l'on écoute avec une patience et une précision de détective pourquoi il "faut que ça se répète", on arrive parfois à s'approcher de cette terreur que protège la répétition. Les crises d'angoisse, la peur d'être abandonnée, les symptômes, sont là pour empêcher le sujet de percevoir les loyautés infantiles qui le protègent. Plus insistantes que le moi lui-même, elles maintiennent fermé le champ de l'avenir."

 

(Anne Dufourmantelle, En cas d'amour. Psychopathologie de la vie amoureuse, Payot-rivages, 2012, p.28-29)

L'inconscient freudien Avignon

10 mai 2023

L’inconscient, ce terme n’est pas de Freud.

Il apparaît, d’emblée, dans un sens privatif, en philosophie, et en psychologie dans la deuxième moitié du XIXè siècle. Nietzsche parle des "oubliettes de l'âme" !

Il s'agit de ce qui n’est pas conscient, un-bewusste, in-conscient.

C’est aussi un terme du langage courant, comme adjectif, « ce qui n’est pas conscient », comme substantif « irresponsable », un peu « fou », incapable de se rendre compte de ses faits et gestes.

Comme concept, en 1751 un juriste écossais, Henry Home Kannes, y fait référence pour signifier la « non-conscience ».

Puis il est vulgarisé en Allemagne, à l’époque romantique, comme réservoir d’images mentales, source de passions dont le contenu échappe à la conscience.

Introduit en langue française vers 1860, avec la signification de vie inconsciente par l’écrivain suisse Henri Amiel (1821-1881).

Admis dans le Dictionnaire de l’Académie Française en 1878.

En psychanalyse, cela devient autre chose : un lieu, Freud en parle comme d’une autre scène, eine andere Platz, ou aussi eine andere Schauplatz. Une place, un lieu où quelque chose se montre, se fait voir, entendre, se révèle. C’est d’abord une hypothèse (confirmée aujourd’hui), un lieu inconnu de la conscience (spontanée et réfléchie). C’est un lieu psychique spécifiquement référé à une sorte de conscience inconsciente.

Freud n’invente pas le concept, il lui donne un sens nouveau, qu’il va légitimer avec ses investigations personnelles.

Destin et psychothérapie Avignon

10 mai 2023

2 grandes forces composent la personnalité : 

- la génétique 

- l’empreinte familiale et parentale inconscientes.

Un travail sur soi permet de connaître les influences inconscientes et de les modifier pour mettre de l’huile dans les rouages.

Une façon d'interroger le symptôme dans son rapport au fantasme et aussi de saisir les processus d'identification inconsciente à des modèles que nous nous sommes choisis.

C’est peu, mais c’est énorme !

Cela suppose une grande souplesse et une grande intelligence…

Être son pire ennemi Avignon

9 mai 2023

Le surmoi ne prononce pas d'injonctions, il ne dit pas: "Tu dois", mais : "Tu aurais dû" ou : "Tu n'aurais pas dû" (il vous tutoie toujours celui-là, ce détestable ennemi intime qui prétend être votre ami, vouloir votre bien). Il vient constater la faute après qu'elle a été commise. L'effort de l'obsessionnel pour faire que la faute, fût-ce la plus infime, n'ait pas été commise, pour que ça ne soit pas arrivé (l'annulation rétroactive), vise à contrecarrer la voix du surmoi. Elle ne parvient qu'à la renforcer, à en accentuer la férocité, une férocité parfois doucereuse.

 

(J.-B. Pontalis, En marge des jours)