Altérité et psychanalyse, Fabrice Luchini Avignon

29 mai 2024

Altérité et psychanalyse :

« Pour être avec l’autre, il faut avoir compris des choses en soi. Si tu n’as rien compris en toi, si, comme dit Simone Veil, tu ne t’es pas élucidé un minimum , qu’est-ce que tu vas comprendre de l’autre ? Tu ne comprendras de l’autre que ce que tu as vaguement compris de toi. Je ne peux jouir de l’autre qu’en ayant de l’empathie, pour avoir de l’empathie il faut que je le comprenne. Pour le comprendre, au sens premier (le prendre avec) il faut que je comprenne des choses en moi pour que ce qu’il est résonne en moi. Et pour que ça résonne en moi comme un , il faut quand même que je m’y sois colleté à ce que je suis (qui est minable, médiocre, chaotique, inconséquent), mais tant que tu n’as pas un début d’élucidation de ce que tu es, qu’est-ce que tu vas recevoir de l’autre ?! Tu ne vas rien comprendre de l’autre parce que pour comprendre l’autre et bien il faut avoir compris soi […] Tu n’as de sympathie avec l’autre que ce que tu as accepté de sympathie avec toi. Une véritable sympathie pas une relation mondaine, c’est autre chose, ça c’est une ivresse. Ce que je peux dire modestement c’est que mon affection pour l’autre ne peux pas ne pas dépendre de ce que j’ai accepté d’aimer un peu en moi. Car si je ne connais rien du tout de moi et si je ne sais pas qui je suis, je vais être dans un tel état d’incertitudes, de non présence, que je ne vais rien voir dans l’autre, je ne vais voir dans l’autre qu’une confirmation de moi et, ici, la phrase de Nietzsche est admirable : « Je vais l’utiliser, l’instrumentaliser, pour en faire un spectateur et non pas une rencontre. 

Fabrice Luchini / "Pour être avec l'autre"

Lien pour écouter (source : 'A voix nue", France Culture ) : https://youtu.be/rhZe5BBTCp8?si=2NTZOP5zwilhpl2I

Destin, liberté et psychanalyse Avignon

20 mar 2024

Nous sommes les premiers à accomplir notre destin et à nous placer face au boomerang du réel de l'existence. C'est ainsi que nous  supportons une certaine dose de malheur par dévouement ou masochisme, persuadés que c’est notre lot ou bien notre destin. Persuadés aussi que nous ne valons pas mieux que ce qui nous arrive.
Freud avait raison quand il a décrit la névrose de destinée. Croire à un destin expiatoire est très névrotique. Il n’est de destin que d’inconscient… C'est là l'aspect punitif du Surmoi.

C'est en cela, la psychanalyse nous aide à prendre en main notre destinée pour en faire une destination. La psychanalyse nous apporte la libération et l'oubli et nous permet de reprendre en main notre destin pour en faire une destination.

Créativité et psychanalyse Avignon

20 mar 2024

Si donc nous voulons être des initiés de la vie, il est deux choses qu’il nous faut prendre en compte : d’abord la grande mélodie, à laquelle œuvrent les choses et les parfums, les sentiments et les passés, les crépuscules et les nostalgies.

Et, ensuite, les voix individuelles qui complètent et parachèvent ce grand chœur.

Et pour justifier une œuvre d’art, c’est-à-dire une image de la vie profonde, du vécu qui n’est pas seulement d’aujourd’hui mais possible toujours et en tous temps, il sera nécessaire de mettre dans une relation juste et d’équilibrer ces deux voix, celle d’une heure donnée et celle du groupe d’êtres humains qui s’y trouvent.
(...)

Pour atteindre ce but, il faut avoir discerné les deux éléments de la mélodie vitale dans ses formes primitives ; il faut avoir extrait des tumultes grondants de la mer le rythme de la vague et dégagé de l’entrelacs confus des paroles quotidiennes la ligne vivante qui porte les autres. Il faut mettre côte à côte les couleurs pures pour apprendre à connaître leurs contrastes et leurs affinités. Il faut avoir oublié le multiple pour l’amour de l’essentiel.

Rainer Maria RILKE - Œuvres en Prose, Notes sur la mélodie des choses, traduction Claude David, Pléiade, Gallimard, 1993.

Destin et psychanalyse Avignon

20 mar 2024

Nous sommes les premiers à accomplir notre destin et à nous placer face au boomerang du réel de l'existence. Ce qui fait que nous supportons une certaine dose de malheur par dévouement ou masochisme, persuadés que c’est notre lot ou bien notre destin.
Freud avait bien raison quand il a décrit la névrose de destinée. Croire à un destin expiatoire est une conception névrotique. Il n’est de destin que d’inconscient…

La psychanalyse apporte la libération et l'oubli, elle nous permet de reprendre en main notre destin pour en faire une destination.

Le symptôme Avignon

20 déc 2023

" J’appelle symptôme tout ce qui vient du réel. Et le réel c’est tout ce qui ne va pas, ce qui ne fonctionne pas, ce qui fait obstacle à la vie de l’homme et à l’affirmation de sa personnalité. Le réel revient toujours à la même place, on le trouve toujours là, avec les mêmes manifestations. Les scientifiques ont une belle formule : qu’il n’y a rien d’impossible dans le réel. Il faut un sacré culot pour des affirmations de ce genre, ou bien comme je le soupçonne, l’ignorance totale de ce qu’on fait et de ce qu’on dit.

Le réel et l’impossible sont antithétiques ; ils ne peuvent aller ensemble. L’analyse pousse le sujet vers l’impossible, elle lui suggère de considérer le monde comme il est vraiment, c’est-à-dire imaginaire et sans aucun sens. Alors que le réel, comme un oiseau vorace, ne fait que se nourrir de choses sensées, d’actions qui ont un sens.

On entend toujours répéter qu’il faut donner un sens à ceci et à cela, à ses propres pensées, à ses propres aspirations, aux désirs, au sexe, à la vie. Mais de la vie nous ne savons rien de rien, comme s’essoufflent à l’expliquer les scientifiques."

 

(Jacques Lacan, Entretien avec Emilia Granzotto pour le journal Panorama - Rome 74 )

La psychanalyse, Isabelle Huppert Avignon

10 déc 2023

Isabelle Huppert : "J’ai commencé une analyse quand j’avais vingt ans, à peu près au moment où j’ai commencé à jouer. J’ai senti très tôt qu’il y avait certaines images, certains clichés qui sont attachés à la fonction d’actrice ; que ce n’était pas par là que j’allais expérimenter le fait d’en être une. Je pensais, d’abord, qu’être actrice, c’était exprimer quelque chose de l’ordre de la souffrance. Ce que j’appelais la souffrance était peut-être simplement le regard, le mien. Voir la vérité. C’était peut-être ça que j’appelais la souffrance. (...)
Je crois que dès le début, il y a eu pour moi ce travail sur la vérité. Les acteurs disent communément qu’ils adorent s’abandonner dans les personnages, mentir, se déguiser ou penser qu’ils ont d’autres vies. C’est un discours qui m’a toujours été totalement étranger. Je n’ai jamais pensé qu’être actrice, c’était aller habiter d’autres vies. Pour moi, c’était au contraire une inlassable exploration de moi-même, un mouvement en profondeur et non pas un élan vers l’extérieur ; une verticalité. " 

(Cahier du cinéma, n° 477, mars 1994,  https://www.antoinette-fouque.com/fiches/dialogue-isabelle-huppert)

F. DOSTOÏEVSKI et l'humanisme

2 sep 2023

A l’heure actuelle, chacun s’efforce de goûter la plénitude de la vie en s’éloignant de ses semblables et en recherchant son bonheur individuel. Mais ces efforts, loin d’aboutir à une plénitude de vie, ne mènent qu’à l’anéantissement total de l’âme, à une sorte de suicide moral par un isolement étouffant. A notre époque, la société s’est décomposée en individus, qui vivent chacun dans leur tanière comme des bêtes, se fuient les uns les autres et ne songent qu’à se cacher mutuellement leurs richesses. Ils en viennent ainsi à se détester et à se rendre détestables eux-mêmes. L’homme amasse des biens dans la solitude et se réjouit de la puissance des biens qu’il croit acquérir, se disant que ses jours sont désormais assurés. Il ne voit pas, l’insensé, que plus il en amasse et plus il s’enlise dans une impuissance mortelle. Il s’habitue en effet à ne compter que sur lui-même, ne croit plus à l’entraide, oublie, dans sa solitude, les vraies lois de l’humanité, et en vient finalement à trembler chaque jour pour son argent, dont la perte le priverait de tout. Les hommes ont tout à fait perdu de vue, de nos jours, que la vraie sécurité de la vie ne s’obtient pas dans la solitude, mais dans l’union des efforts et dans la coordination des actions individuelles.» (Fiodor Dostoïevski)

Le temps dans la cure

25 aoû 2023

"Le choix de la direction ou du chemin ne doit pas être décidé par une norme, pas même par la sagesse. On attend du thérapeute ou de l'analyste qu'il pousse le patient dans la direction de son désir. En fait, c'est pourquoi la thérapie prend du temps, car, avant, poussant, le désir doit pouvoir se manifester un peu."

" Lettres au jeune thérapeute - Contardo Calligaris, 2004.

ITW du docteur Dominique BARBIER pour le journal Le Vif

ITW du docteur Dominique BARBIER pour le journal Le Vif

27 juin 2023

Le Docteur Dominique BARBIER, Psychanalyste à Avignon, a récemment effectué une interview en format ITW pour le journal Le Vif intitulé "l'adulte est devenu une espèce en voie de disparition".

Retrouvez l'ensemble de cette interview dès à présent.

En savoir plus

Pour toute demande de renseignement, n'hésitez pas à contacter Dominique BARBIER, psychanalyte à Avignon.

Hypnose maternelle et hypnose paternelle selon Freud Avignon

29 mai 2023

Ferenczi a raison de dire qu’en adressant au sujet l’ordre de dormir, qui sert d’introduction à l’hypnose, l’hypnotiseur prend, aux yeux de celui-là, la place des parents. Il croit pouvoir distinguer deux variétés d’hypnose : celle qui résulte d’une suggestion apaisante, comme accompagnée de caresses, et celle qui est produite par un ordre menaçant. La première serait l’hypnose maternelle, la dernière l’hypnose paternelle.

 

D’autre part, l’ordre de dormir, destiné à provoquer l’hypnose, n’est en somme que l’ordre de détacher son intérêt du monde extérieur, pour le concentrer tout entier sur la personne de l’hypnotiseur : c’est d’ailleurs ainsi que le comprend le sujet lui-même, puisque dans ce détachement de l’intérêt des objets et faits du monde extérieur réside la caractéristique psychologique du sommeil, et c’est sur lui que repose l’affinité entre le sommeil véritable et l’état hypnotique.

 

C’est ainsi que, par ses procédés, l’hypnotiseur éveille chez le sujet une partie de son héritage archaïque qui s’est déjà manifesté dans l’attitude à l’égard des parents, et surtout dans l’idée qu’on se faisait du père : celle d’une personnalité toute-puissante et dangereuse, a l’égard de laquelle on ne pouvait se comporter que d’une manière passive et masochiste, devant laquelle on devait renoncer complètement à sa volonté propre et dont on ne pouvait aborder le regard sans faire preuve d’une coupable audace.

 

C’est ainsi seulement que nous pouvons nous représenter l’attitude de l’individu de la horde primitive à l’égard du père de la horde. Ainsi que nous le savons par d’autres réactions, l’aptitude à revivre ces situations archaïques varie de degré d’un individu à l’autre. Le sujet est cependant capable de conserver une connaissance vague qu’au fond l’hypnose n’est qu’un jeu, qu’une reviviscence illusoire de ces impressions anciennes, ce qui suffit à l’armer d’une résistance suffisante contre les conséquences trop graves de la suppression hypnotique de la volonté.