L’incertitude est ce dont la névrose a le plus horreur.
Toute notre organisation névrotique (et nous sommes tous névrosés) consiste à faire barrage à l’inattendu. L’inconscient est un GPS qui intègre toutes les données de votre généalogie, de votre enfance et de ce que vous avez vécu. Il vous indique des chemins et des routes qu’il trouve plus sûrs ou moins encombrés.
Si vous lui donnez un itinéraire ou un lieu inconnu, il va tout faire pour que vous n’y alliez pas parce qu’il y a trop de risques. Par contre, ce qui est sympathique avec l’inconscient c’est que, de la même manière qu’un GPS, il va intégrer la nouvelle route la deuxième fois, il va y aller. L’inconscient fonctionne dans la répétition.
Cette capacité à l’inattendu c’est quelque chose qu’il faut trouver dans l’aptitude à être au présent.
Et le lâcher prise est fondamental. Le problème, c’est que cela ne se décide pas. Ce n’est pas une question de volonté.
Le lâcher prise n’empêche pas la vigilance. Au contraire, il l’appelle.
Le risque met sur le qui-vive, puisqu’il y a du danger. Cela met en éveil.
Il faudrait lutter contre les deux piliers de la névrose qui, pour éviter l’inattendu, se repose à 90% sur deux grosses ficelles – à savoir « la vie commence demain » ou dans deux heures ou dans une heure.
C’est-à-dire qu’elle vous dit : « Oui, bien sûr, on va changer ci et ça ». Elle est très accommodante, la névrose. Elle veut bien changer, mais pas tout de suite.
L’autre ficelle, c’est le tout ou rien. « C’est noir ou blanc ». D’où l’idée qu’il n’y a pas de petit choix, comme s’il n’y avait pas de gris entre les deux. Or, dès que vous commencez du gris, vous amorcez quelque chose.
(Anne Dufourmantelle, Eloge du risque)