Roland GORI, une époque sans esprit, Avignon

 

La psychanalyse n’a pas de but, annonce d’emblée Roland Gori depuis son fauteuil de chercheur et de thérapeute. Tout le reste du propos consiste à éclairer le spectateur sur ce qui fait l’essentiel de la matière de la vie. Le psychanalyste égrène dans une voix délicate et apaisante les enjeux de cet art, mais surtout il éveille aux dimensions plus larges que l’accompagnement psychologique infère. Gori refuse le déterminisme, l’obsession rationnelle qui induiraient sur chaque être humain l’obligation d’une performance, ce qui, à son avis, conduit au pire.

 

De temps en temps, des images du périphérique parisien, de Marseille, de New York apparaissent, comme une pause salvatrice dans une longue et belle conférence où chaque mot est pesé, et surtout rempli d’intelligibilité. Le réalisateur, Xavier Gayan, amène le psychanalyste à développer des thèmes nombreux qui, en réalité, interrogent la vacuité de la modernité. Sa parole est humaniste, au sens d’une expérience de la vie dégagée du démon de l’efficience qui ramène chaque individu à son enfance, son désir, son manque et son identité multiple.

Le propos est d’autant plus important que le réalisateur convoque aux côtés de Roland Gori des philosophes, éditeurs ou directeurs de théâtre. Cela a pour effet de rendre concrète l’approche psychanalytique, de l’inscrire dans la réalité de la vie, là où souvent elle est perçue comme perchée et trop éloignée des gens. Roland Gori, une époque sans esprit s’affirme comme un film nécessaire, au cœur du rythme fou de l’existence contemporaine. Le psychanalyste emprunte un langage métaphorique, parfois poétique, parfois drôle, en tous les cas au plus près des préoccupations des spectateurs.

(Laurent Cambon, Avoir à lire)

                                                                      

 

Date: 
Samedi, 3 septembre, 2022
Image: